Elle quittait le supermarché.
À la sortie sud de la galerie marchande qui juxtaposait la grande surface, elle jettait un coup d’œil vers le ciel, temps exécrable, elle remet son Châle en resserrant le ceinturon de sa vareuse-journée revêche- pensait-elle avec dédain.
Au parking, sa Twingo mauve est imbibée de flacons de neige. Une tempête est passée par là laissant à la traîne une ambiance paisible qui lui procure un semblant de bien être. Soudain, Le ciel qui avait l’air menaçant mais pas que, s’éclaircit. Sensations chaleureuses et contradictoires, se dit-elle. Les nuages s’envolaient vers le sud à la quête d’autres terroirs plus arides. Un arc en ciel emplissait le monde, décampait de temps à autre pour renaitre simultanément et réapparaitre plus étincelant et majestueux remplissant l'espace avec mille et une couleur.
Un Q7 noir jailli d’un emplacement en face, déboule.
Le bolide est imposant, piloté par un homme dont le visage ne lui est pas méconnaissable. Le jeune homme d’une posture mirobolante, regarde la jeune femme du haut de sa monture, freine son tout terrain qui s’immobilise, les regards se croisent s’entrechoquent font voler en éclat des milliers d’images en extorquant au passé des souvenirs enfuis dans les mémoires. Les chutes de neiges refont leur apparition, un silence étrange s’installe pour un temps, pour une éternité. Orgueilleux, il s’élance, disparait en laissant la jeune femme pensive, songeuse.
Histoire oubliée. Mais voilà que les synchronismes de la vie entrouvrent la plaie qu’elle avait présumée définitivement fermée. La coïncidence d’une rencontre inopinée qui attise cette rancune qui n’a pas disparu totalement de son être et qui l’avait fait tant souffrir dans le passé.
Histoire réglée avec le train-train machiavélique de la vie. Les circonstances de cette rencontre hasardeuse sont semblables à ce qui pourrait arriver sur le passage à niveau que vous avez l’habitude de franchir avec votre véhicule et qui a toujours été ouvert et la voie ferrée restait paisible. Un matin, il pleut des cordes, votre voiture tombe en panne sur ce passage et nulle part ailleurs, instantanément la sonnerie retentit annonçant l’approche d’un train de marchandise. Vous vous sentez en droit de poser une multitude de questions.
Mais, encore une fois, elle ne résiste pas à se remémorer cette trahison d’un homme qui lui avait promis le bonheur en échange d’une vie commune en Europe. Elle s’affaisse sur le siège de sa petite auto et s’engage vers la sortie sans savoir où aller. Sur une route interminable, elle ne cesse de penser à cette perfidie commise par cet homme qu’elle vient d’apercevoir sur les travées d’un parking. Elle n’en finit pas de se reposer des questions sur le pourquoi de cette infidélité perpétrée à son encontre par l’être qu’elle avait chéri à un moment de sa vie. La vie a une intensité à laquelle elle n’a pas été préparée.
Croire un Marocain quand il vous clame son amour c’est faire preuve d’une niaiserie.
Il lui a juré, pourtant, à elle la Française, que dés qu’il serait en France, à ces cotés, il ferait tout pour que leur vie soit belle et douce. Hélas à partir du moment où la situation du renégat fut régularisée, lui, le défroqué, qui rêvait de vivre en Europe dont la foi n’était pas de celles qui soulevaient les montagnes, a donc trahi. Sa comédie a pris fin dés qu’il a eu, entre ses mains, le passeport Européen.
Tant pis, se dit-elle. Au fond, sur les Alpes, qui lui faisaient face, le soleil vient de refaire son apparition, les tristes mémoires sont lointaines.